La presse évoque depuis quelques jours une hausse des régularisations de 50% en 2013 qui serait due aux conséquences de la circulaire VALLS du 28 novembre 2012. Qu’en est-il vraiment ? Jeudi 10 avril 2014, le Ministère de l’Intérieur publiait une note résumant la diffusion des informations statistiques annuelles en matière d’immigration, d’asile et d’acquisition de la nationalité française. J’observe depuis quelques jours les réactions à la suite de la publication de ces chiffres et je ne peux m’empêcher de réagir.

 

Certes, le calendrier politique donne un éclairage particulier à ces chiffres puisque Manuel VALLS qui était à l’époque Ministre de l’Intérieur a changé de fonction devenant aujourd’hui Premier Ministre. L’évocation de ces chiffres, tels qu’ils sont cités aujourd’hui, semble lier la hausse des régularisations des étrangers pour l’année 2013 à la circulaire qu’il avait prise le 28 novembre 2012.

 

Certes, il s’agissait à l’époque d’une circulaire très remarquée puisqu’elle concernait un public assez vaste d’étrangers en situation irrégulière, permettant à la fois la régularisation du séjour tant des familles étrangères ayant des enfants scolarisés, que des conjoints d’étrangers en situation irrégulière, que des mineurs et bien entendu des travailleurs étrangers présents sur le territoire français depuis plus de cinq ans.

 

La question qui se pose aujourd’hui est de savoir si la circulaire VALLS a permis un accroissement important des régularisation, laissant alors pensé qu’elle doit être interprétée comme ayant créé des (nouveaux) cas de régularisation ou si elle n’a fait qu’éclaircir des critères de régularisation qui, bien qu’existants, pouvaient être d’une interprétation floue.

 

En réalité, j’avais à l’époque beaucoup commenté cette circulaire et j’avais, dès le lendemain de sa publication, indiqué qu’elle n’apportait rien de nouveau dans l’ordonnancement juridique en matière de droit des étrangers sinon qu’éclaircir des critères de régularisation qui n’avaient jamais été énoncés aussi clairement, tentant par la même d’uniformiser les pratiques des préfectures pour éviter trop de « cas par cas » pouvant conduire les étrangers à être régularisés dans certaines préfectures et pas dans d’autres…

 

En effet, la circulaire du 28 novembre 2012 reprend pour l’essentiel les grandes lignes jurisprudentielles en droit des étrangers construites depuis les vingt dernières années.

 

Par exemple, quand Manuel VALLS évoque dans la circulaire les cas de régularisation des parents d’enfants scolarisés, il ne fait que synthétiser une jurisprudence classique centrée autour de l’article 3-1 de la convention internationale des droits de l’enfant pour inviter les Préfets, en leur donnant certains critères supplémentaires d’uniformisation de leurs pratiques, pour entrer en voie de délivrance de titre.

 

Pour les étrangers mariés à des étrangers en situation régulière, là encore le Ministre VALLS prend acte de grandes lignes jurisprudentielles pour synthétiser son propos. C’est le cas également des mineurs devenus majeurs.

 

Enfin, s’agissant des critères de régularisation par le travail des étrangers sans papiers et justifiant notamment de contrats de travail ou de promesses d’embauche, Manuel VALLS a pour la première fois en tant que Ministre de l’Intérieur fait ce qu’aucun autre ministre n’avait jamais fait (y compris bien entendu les anciens Ministres de l’immigration) c’est  à dire oser aborder les sujets des étrangers présents depuis plusieurs années sur le territoire français (5 ans) et tellement bien intégrés qu’ils travaillent, ont des fiches de paie et déclarent même des impôts.

 

Là encore, la jurisprudence n’avait pas attendu l’édiction de cette circulaire pour régulariser des étrangers présents en France et présentant d’excellentes garanties d’intégration comme dans ces cas, et en cela, la circulaire n’apporte rien de nouveau. Toute au plus, comme dans les cas précédents, elle a le mérite de donner une feuille de route aux Préfets pour uniformiser leurs pratiques ce qui ne peut qu’être appréciable…

 

Alors, au vu de cette circulaire, peut on penser que Manuel VALLS a créé un appel d’air d’immigration en France ou fait « bondir » l’immigration depuis le début de l’année 2013 ?

 

Non. Cette circulaire doit plutôt être interprétée à mon sens comme celle de la fin des quotas, non pas de reconduite à la frontière, mais ceux plus officieux de délivrance des titres de séjour, pratique qui s’était progressivement développée sous la présidence SARKOZY.

 

En réalité, à bien y regarder, cette circulaire a eu le mérite de s’attaquer à des cas de régularisation qui existaient mais qui n’étaient pas jusqu’à présent interprétés de manière uniforme par les Préfets. Pour autant beaucoup de dossiers étudiés sous l’angle de cette circulaire ont été refusés par les Préfets ce qui signifie au contraire que les critères énoncés ont été fermement appliqués (ce que je déplore néanmoins).

 

Alors et les chiffres dans tout cela ? On constate à la lecture des chiffres énoncés pour 2013 qu’une bonne partie des régularisations énoncées ne concernent pas la circulaire comme les étudiants ou les travailleurs scientifiques par exemple…

 

Le reste ne révèle qu’une évolution normale du nombre de régularisations annuelles, répondant aux critères classiques du droit des étrangers, évolution qui, depuis 2012, ne semble plus souffrir de quotas d’admission au séjour. Pour quelques informations supplémentaires sur l’admission au séjour par le travail, regardez cette page.

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